Le communiqué final de la 63e conférence des chefs d’Etat de la CEDEAO a accouché de quelques décisions très importantes. Naturellement, la lutte contre le terrorisme, la performance économique, la monnaie unique… sont des sujets qui ont été discutés lors du huis-clos. Et la volonté de mettre sur pied, la Force-CEDEAO (FAC) est à féliciter. Comment mettre en place une force Made in CEDEAO pour remplacer Barkhane, la MINUSMA et autres Takuba dans ce Sahel complexe en ébullition guerrière ?

En tout cas, un mémorandum sur l’opérationnalisation de cette force en attente de la CEDEAO (FAC) pour lutter contre le terrorisme a été ébauché avec un total de 5 000 hommes, et une invite à l’activation de cette force qui a trop attendu.

Au niveau de la démocratie, la paix et la sécurité, on ne peut que s’attarder sur les chronogrammes des trois Transitions au Burkina, au Mali et en Guinée. Si la CEDEAO est mécontente du peu d’empressement de ces pays à recevoir les médiateurs attitrés, la Guinée a même renvoyé le sien, les chefs d’Etat notent une volonté d’aller vers un retour à des normes constitutionnelles dans les délais impartis. Au Mali, au Burkina Faso et en Guinée, des militaires mènent la danse politique, avec une particularité pour les deux premiers, en proie à un terrorisme très meurtrier, malgré des victoires grappillées par-ci et là.

Bola A. Tinubu hérite d’une CEDEAO qui veut en même temps poser des actes : être en osmose avec les peuples. Il a le dossier de la mise en branle de la force en attente de la CEDEAO.

Photo de famille des chefs d’Etat présents au 63e sommet de la Cedeao à Bissau

La CEDEAO a été surtout regardante (effet UEMOA sans doute) sur l’agenda de ces trois transitions, et apparemment, l’inflexion amorcée et adoptée depuis quelques temps se poursuit. Si l’organisation sous régionale a observé une certaine retenue, ressemblant à une tolérance ces derniers temps (avait-elle le choix ?) c’est que ceux qui ont pris le pouvoir semblent tracer les sillons d’un retour à une vie constitutionnelle normale, même si quelquefois, la vague impression qu’on n’avance pas se fait jour. Respect du timing des transitions au Burkina et au Mali avec un processus transparent et une collaboration avec médiateurs et experts. Bref, on cale sur le respect des timings transitionnels. En Guinée, c’est l’absence de dialogue avec les acteurs politiques, qui a été déplorée et une invite à la corriger de façon inclusive.

Bola A. Tinubu hérite d’une CEDEAO qui veut en même temps poser des actes : être en osmose avec les peuples. Il a le dossier de la mise en branle de la force en attente de la CEDEAO.

Le nouveau Président en exercice de la CEDEAO, le «bleu» Bola Ahmed Tinubu, sitôt élu au Nigeria, et dont c’est la première participation, remplace Umaro Sissoko Embaló et prend donc la tête de l’organisation. Ce sommet tourne donc une page importante de la vie de l’institution, celle de la présidence du Chef de l’Etat, bissau-guinéen qui n’aura pas été de tout repos et qui explique aussi en partie son désistement à un second mandat, même s’il avance d’autres raisons : «je suis dans un processus de cohabitation depuis les législatives du 4 juin. Cela va requérir toute notre attention» avait-il laissé entendre. Si l’homme s’est voulu présent dans toutes les crises qui secouent la région, notamment au Mali, au Burkina et en Guinée, on retiendra de son passage à la tête de l’organisation communautaire, sa tentative de créer une force anti-putschiste, une idée qu’il n’aura cependant pas eu le temps de porter sur ses fonts baptismaux. Il quitte donc la tête de la CEDEAO sans avoir résolu les crises militaires, laissant de nombreux défis au Chef de l’Etat nigérian qui n’aura pas droit à un round d’observation. Le tout nouveau numéro 1 nigérian hérite d’une CEDEAO qui veut en même temps poser des actes, être en osmose avec les peuples. Il a le dossier de la mise en branle de la force en attente de la CEDEAO, une force qui doit forcément être active et il a aussi en face trois militaires qui doivent travailler à remettre le pouvoir aux civils. Et il se veut ferme. Morceaux choisis : « la démocratie est la meilleure forme de gouvernement, bien qu’elle soit très difficile à gérer, nous en avons besoin pour être un exemple pour le reste de l’Afrique et du monde. Nous ne permettrons pas qu’il y ait coup d’Etat après coup d’Etat en Afrique de l’Ouest. » On sait le poids que pèse le Nigeria au sein de la CEDEAO. Mais en même  temps, que la CEDEAO guerroie contre les putschistes militaires, il va falloir qu’il légifère aussi sur les tripatouillages indécrottables de Lois fondamentales d’autant que le phénomène rivalise avec les coups d’Etat militaires.Si Macky Sall a été félicité par ses pairs pour y avoir renoncé, ces pantalonnades sont loin d’avoir vécu. Il suffit d’un rien qu’un président se sente indispensable.