A son tour le secteur agricole africain entre dans l’ère numérique. En atteste le cri de ralliement : en ordre de bataille pour cultiver autrement en Afrique aussi. Aux manettes désormais une horde de Gentelmen Farmers, armés de dernières inventions technologiques, qui bousculent chaque jour un peu plus l’ensemble des pratiques archaïques du secteur avec l’apport du digital dans l’ensemble de la chaîne de valeur. Qui sont-ils ? Voyage à travers dix pays du continent à la découverte de ces agriculteurs 2.0.  

Joseph-Olivier Billy, fondateur de Wefly Agri

Côte d’Ivoire : WeFly Agri pour optimiser la production

WeFly Agri est une startup ivoirienne à l’ambition africaine, fondée en 2018 par Joseph-Olivier Biley. L’idée lui est venue quand son père, qui possède une plantation, a enregistré d’énormes pertes financières : «La raison était qu’il n’avait pas le temps d’y aller régulièrement, et les employés en profitaient. J’ai constitué une équipe, ensemble nous avons développé une solution que je qualifierais de révolutionnaire. Celle-ci permet aujourd’hui à mon père et à toutes les personnes qui vivent les mêmes défis, de suivre l’évolution de leur plantation et d’optimiser sa gestion sans se déplacer et dans le confort de leurs maisons», se plait-il d’expliquer. 

Spécialisée dans le consulting agronomique, WeFly Agri fournit aux exploitants agricoles divers outils pour optimiser leur rendement, surtout à ceux qui manquent de ressources humaines pour s’occuper des terres. Ses experts agronomes et solutions technologiques peuvent aider à mettre en place une nouvelle plantation, la gérer et l’optimiser en fonction des facteurs et contextes, de procéder aux récoltes et de stocker/conditionner ces dernières.

Le service de WeFly Agri est axé sur 3 points : les drones de précision qui permettent de collecter des données, un logiciel de traitement de données qui analyse les surfaces afin d’identifier de possibles problèmes, et une équipe d’agronomes pour la mise en application des recommandations. La startup offre ainsi divers services d’appui aux coopératives agricoles et aux exploitants, parmi lesquels la cartographie, le diagnostic phytosanitaire, la pulvérisation aérienne, etc.

En 2021, Joseph-Olivier Biley crée également Jool International pour franchir un nouveau cap, avec une entreprise davantage axée sur la technologie. Il commence à fabriquer des drones pour l’agriculture, mais aussi des robots terrestres et des logiciels, le tout made in Côte d’Ivoire !  

Si cette nouvelle entreprise est récente, avec beaucoup de produits au stade de développement, elle est déjà rentable. Il a racheté une startup française de 6 ans d’existence pour obtenir des brevets stratégiques pour son développement, faisant de son entreprise la première à faire une telle opération dans sa région. Au premier trimestre, Jool International a déjà fait plus d’1 million d’euros de chiffre d’affaires, alors que les investisseurs n’en attendaient que 300 000 euros sur l’année.

Ghana : Farmerline pour des pratiques agricoles intelligentes

Lancée en 2013 par Alloysius Attah et Emmanuel Owusu Addai, Farmerline s’associe à des entreprises agroalimentaires et à des associations agricoles pour soutenir les agriculteurs africains avec des engrais et des semences de haute qualité, une éducation gratuite sur les pratiques agricoles intelligentes face au climat et un accès aux marchés internationaux. La startup offre également aux agriculteurs africains un accès illimité aux marchés du monde entier et une formation aux techniques agricoles intelligentes pour le climat. Les commerçants partenaires utilisent la plateforme technologique d’IA unique de Mergdata pour l’intelligence de la chaîne d’approvisionnement afin de numériser les agriculteurs et de leur fournir les données dont ils ont besoin pour prévoir la demande de produits agricoles et éviter les ruptures de stock.

Aujourd’hui, Farmerline voit plus grand. Elle vient de boucler sa deuxième levée de fonds de pré-série A avec un apport supplémentaire de 1,5 million de dollars de l’investisseur à impact social Oikocredit. 

Avec cette levée de fonds, Farmerline va poursuivre son soutien auprès des petits exploitants agricoles et les entreprises agroalimentaires au Ghana mais aussi se développer en Côte d’Ivoire et renforcer son offre d’engrais face à la hausse des prix et les pénuries. En août dernier, Farmerline a lancé son initiative Support à Farmer (une campagne publique de financement participatif pour collecter 1 million de cédis dans le but de fournir 250 000 sacs d’engrais à prix réduit à 25 000 agriculteurs à travers le Ghana). 

L’investissement fait partie d’un cycle de financement total d’une valeur de 14,4 millions de dollars levé par Farmerline en avril dernier dont un investissement de 6,4 millions de dollars mené par Acumen Resilient Agriculture Fund (ARAF) et la banque néerlandaise de développement FMO ainsi que la Greater Impact Foundation et 6,5 millions de dollars de dette auprès notamment de DEG, Rabobank, Ceniarth, Rippleworks, Mulago Foundation, Whole Planet Foundation, Netri Foundation et Kiva.

Farmerline affirme avoir réussi à financer l’acquisition d’intrants et de cultures d’une valeur de plus de 18 millions de dollars en concluant des accords de franchise avec des agro-industries et des fournisseurs de biens agricoles. Farmerline affirme également avoir financé l’acquisition d’intrants et de cultures d’une valeur de plus de 18 millions de dollars en concluant des accords de franchise avec des agro-industries et des fournisseurs d’intrants. La startup souhaite se connecter avec 300 000 agriculteurs d’ici fin 2022, soit environ 400 % de plus que l’année dernière. L’entreprise est maintenant basée au Ghana mais souhaite se développer en Côte d’Ivoire, elle a donc commencé à embaucher du personnel sur place.

Hamza Rkha Chaham, cofondateur de Sowit

Hamza Rkha Chaham, cofondateur de Sowit

Maroc : Sowit trace les sillons d’une agriculture de précision

Démocratiser les services de l’agriculture de précision en Afrique. Telle est la grande ambition de Sowit, une startup fondée, il y a plus d’un an, par deux jeunes compétences marocaines sensibles aux problématiques agricoles en Afrique, Hamza Bendahou et Hamza Rkha Chaham. Sowit est née après le constat selon lequel les agriculteurs africains produisent en dessous de leur capacité réelle, à cause du manque d’information sur les pratiques agricoles et l’état des terres cultivables. L’agriculture de précision permet une meilleure optimisation des rendements et des investissements, en recourant aux nouvelles technologies. En clair, il s’agit d’une méthode consistant à appliquer des traitements au bon endroit et au bon moment. Chez Sowit, l’offre se décline, entre autres, en deux types d’outils d’aides à la décision. Les premiers sont de nature générique et à valeur informative (météo, prix du marché selon les cultures, tendances anticipées) tandis que les seconds sont personnalisés selon la localisation des champs, le type de culture, l’itinéraire technique et les objectifs de l’agriculteur : conseils pour la fertilisation et l’irrigation.  

Sur le terrain, les données sont récoltées principalement grâce à trois vecteurs d’information différents : des prélèvements du terrain à divers endroits, des images satellites, et une récolte des images via drones. Ensuite, Sowit analyse les données récoltées et fournit à l’agriculteur (via SMS et application) une analyse détaillée de l’état de ses cultures et des informations en temps réel. L’Afrique abrite environ 25% des terres agricoles du monde, mais produit seulement 10% des cultures. Le manque de données sur ces terres constitue un handicap majeur pour de nombreux agriculteurs, et entraîne une baisse de leurs gains. La startup réalise désormais un peu plus de 70% de son chiffre d’affaires sur le continent. Sowit opère, en effet, sur plusieurs marchés du continent notamment en Éthiopie, en Tunisie, en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso et au Sénégal.

Dr. Edeh Dona Etchri, fondateur de en-agri

Togo : « e-agri », l’appli qui met en relation les acteurs du secteur

Dr. Edeh Dona Etchri est une référence pour la jeunesse togolaise et africaine dans le digital et l’e-agriculture. Son grand succès, la plateforme e-agribusiness, transforme peu à peu le paysage agricole du pays. Il s’agit d’une une plateforme de mise en relation des acteurs du secteur agricole pour désenclaver certains agriculteurs, leur offrir un accès à l’information de marché et optimiser le développement de l’agriculture à l’échelle nationale. 

Aujourd’hui, près de 8000 agriculteurs togolais utilisent e-Agribusiness. L’objectif est d’en toucher 1 million dans 8 ans.

La Côte d’Ivoire et le Rwanda s’intéressent de près à ce nouvel outil. «Le secteur emploie près de 60 % de la population, mais il est miné par de nombreux problèmes, constate-t-il. Le principal, c’est la difficulté pour les producteurs à écouler leurs productions. Ils ne connaissent parfois pas leurs acheteurs et ne maîtrisent pas le cours du marché. Avec l’appli, ils ne se font pas avoir, tout est transparent.» Après trois années de phase pilote, l’application a été officiellement lancée en mars 2017. Et depuis, c’est aussi l’outil principal du Mécanisme d’incitation au financement agricole (Mifa), piloté par le ministère de l’Agriculture.

Nkalo

Nkalo

Burkina : Nkalo pour une meilleure compréhension du secteur

Nkalo, fruit d’un partenariat de l’ONG française Rongead et ETC Terra en 2009, propose de conseiller les agriculteurs, notamment sur le prix de vente de leurs céréales. 

La startup est présente dans 7 pays du continent. S’inspirant du modèle de l’entreprise française Offre & Demande Agricole Sarl, l’ONG Rongead expérimente un service d’information et de conseil économique pour les producteurs d’anacarde, en Côte d’Ivoire. Et, alors que ce genre d’initiative ne court pas les rues dans la région, le succès est au rendez-vous. Les concepteurs décident d’étendre NKalo (qui signifie en langue dioula « je sais », « je comprends » ou encore «je suis au courant») à de nouvelles filières et à d’autres pays. Dans le même temps, la startup rend l’accès aux informations payant, ce qui n’empêche pas NKalo de revendiquer des millions de messages envoyés à 30 000 abonnés en 2016. «Depuis 2009, nous avons développé une méthodologie d’analyse des marchés prospective qui nous permet de comprendre les facteurs d’évolution des marchés agricoles et de fournir des conseils stratégiques aux professionnels des filières. Nos bulletins sont rédigés par nos 20 analystes qui s’appuient sur un large réseau diversifié géographiquement et au sein de la chaîne de valeur. Ce service est un véritable outil performant d’analyse des marchés agricoles à destination de tous les professionnels», indique NKalo sur son site internet. L’engouement semble réel : le concept aurait permis à plus de 100 000 agriculteurs répartis dans sept pays (Burkina Faso, Mali, Côte d’Ivoire, Tchad, Sénégal, Gambie et Soudan) de générer un chiffre d’affaires supplémentaire de plus de 5 millions d’euros. Les services de NKalo couvrent plusieurs filières parmi lesquelles l’anarcarde, le sésame, le maïs, l’oignon, le karité, l’arachide.

 

Onyeka Akumah, fondateur de Farmcrowdy

Onyeka Akumah, fondateur de Farmcrowdy

Nigéria : Farmcrowdy, la première plateforme digitale agricole

Quand il lance Farmcrowdy en 2016, Onyeka Akumah n’en est pas à sa première startup. 

Il fait partie également de l’aventure Jumia, Travelbeta

En effet, il a participé à la création de nombreuses sociétés de renom au Nigeria, dont le géant africain de l’e-commerce Jumia et Travelbeta, un service nigérian de réservation de vols. 

Formé comme ingénieur informatique en Inde, il décide de mettre ses compétences au service de l’agriculture au moment où l’administration Buhari, tout juste en place, promet un fort soutien au secteur. Lui et ses cofondateurs, Ifeanyi Anazodo (Vice-président data et intelligence), Jimoh Maiyegun (Directeur technique), Akindele Phillips (Directeur financier) et Tope Omotolani (Directrice des opérations) constatent que près de 38 millions de petites exploitations agricoles au Nigeria ont d’énormes besoin de financement, de formation et de structuration, mais que les entrepreneurs qui proposent ces services rencontrent un trop grand biais d’information auprès des agriculteurs, et manquent de temps pour assurer un suivi de terrain. L’équipe décide alors de se placer comme interface et se met en marche ce qui deviendra bientôt une «foule d’agriculteurs» – Farmcrowdy. La startup propose à tout un chacun – généralement des actifs citadins âgés de 25 à 40 ans – de financer une ferme sur un cycle de récolte, moyennant un retour sur investissement annuel de 22 à 35 %. 

Des profits partagés 

Les exploitations sélectionnées sont de petite taille (1 à 3 hectares) et disposent de capacités de production inexploitées faute de capital et de débouchés. Le sponsor prend ainsi à sa charge l’intégralité des coûts liés à l’exploitation des unités agricoles supplémentaires, qu’il s’agisse de cultures de maïs, de riz, de manioc ou d’élevages de volailles. Durant tout le cycle de récolte, le fermier est accompagné par la startup qui le forme aux techniques modernes d’agriculture, tandis que le sponsor reçoit deux fois par semaines photos, vidéos et rapports sur l’avancement des cultures. Des visites de fermes sont également proposées aux investisseurs qui voudraient se rendre sur le terrain. Une fois la récolte vendue, l’investissement initial retourne au sponsor tandis que le profit est réparti entre le fermier (40 %), l’investisseur (40 %) et la startup (20 %). L’investissement moyen par unité étant de

95 000 nairas (235 euros), les deux parties principales gagnent en moyenne 9 000 nairas par unité, soit la moitié du salaire minimum au Nigeria. Et si cela fonctionne si bien, c’est que la jeune pousse a réussi à lever le biais de confiance tout en apportant une très grande valeur ajoutée aux agriculteurs. Ses équipes sur le terrain travaillent avant tout sur la formation et la lutte contre les mauvaises pratiques (semence souvent erratique, l’absence de soin – désherbage et engrais – pendant la pousse…). Farmcrowdy apporte également équipements mécaniques et tracteurs. Dans un second temps, le programme assure l’accès au marché et assiste les fermiers dans la négociation d’un prix juste pour leurs récoltes. En 2019, la plate-forme d’agriculture numérique nigériane, a obtenu le financement de démarrage supplémentaire d’1 million de dollars en provenance des investisseurs Cox Enterprises, Techstars et Ajayi Solutions.

Eli Pollacj et Earl Sauver, fondateurs de Apollo Agriculture

Eli Pollacj et Earl Sauver, fondateurs de Apollo Agriculture

Kenya : Apollo Agriculture booste les revenus des agriculteurs

Agriculture Apollo aide les agriculteurs sur les marchés émergents à maximiser leurs revenus. La startup utilise le Maching Learning, l’imagerie satellite et l’intermédiaire du téléphone portable pour accorder des crédits, livrer des produits agricoles et délivrer des conseils sur-mesure pour tous les petits propriétaires agricoles. 

Maximiser les profits des agriculteurs 

Eli Pollacj et Earl Sauver, ses fondateurs, sont deux anciens employés de Climate Corporation et One Acre Fund respectivement. Ils aspirent à aider les petits agriculteurs des marchés émergents à maximiser leurs profits. En effet, 50 millions de petits agriculteurs en Afrique subsaharienne ne parviennent pas à augmenter leur rendement, car leurs faibles sources de financements les contraints à utiliser des intrants agricoles de mauvaise qualité. Pour sortir de ce cercle vicieux, en 2016, ils lancent Apollo Agriculture qui s’appuie sur plusieurs technologies de Machine Learning pour avancer des intrants  aux agriculteurs et les conseiller dans la maximisation de leurs rendements agricoles. Les activités de la startup sont prometteuses avec un engagement dans 55 projets intensifs. Apollo Agriculture est parvenue à sécuriser un financement total de 1,6 million de dollars auprès de l’ONG Acción, la fondation MasterCard, la fondation Rabobank et l’organisme néerlandais du financement et du développement. Depuis leur téléphone mobile, les agriculteurs transmettent toutes les informations nécessaires à Apollo Agriculture pour construire leur profil crédit sur mesure à partir de ses technologies de Machine Learning agronomique. Lorsque le profil est établi, Apollo Agriculture transfère le montant du prêt octroyé directement sur téléphone mobile. Cette somme est ensuite allouée à l’achat des intrants agricoles d’excellente qualité. Apollo Agriculture réalise ensuite un accompagnement adapté aux particularités de chaque agriculteur grâce à ses données satellites pour les aider à augmenter leur rendement et faire grandir leur production. Apollo Agriculture utilise les technologies de Machine Learning et les données accessibles par satellites pour augmenter le rendement des agricultures. Cela ne se fait pas automatiquement mais à travers un business model intelligent. Les premières données traitées servent à fournir des crédits permettant l’achat d’intrants à meilleurs rendements. Les autres données servent dans l’accompagnement des agricultures vers la maximisation de la gestion de chaque exploitation. Le tout est permis par le téléphone mobile qui réduit les distances et désintermédie la circulation de l’information. En mars dernier, Apollo Agriculture a annoncé sur sa page Linkedln, la levée d’un financement de série B de 40 millions dollars, dirigé par SoftBank Vision Fund 2.  Cette opération intervient près de deux ans après sa dernière opération de levée de fonds. En mai 2020 en effet, la startup avait obtenu 6 millions de dollars pour davantage investir dans sa croissance.  

Rose Goslinga, fondatrice de Pula

Rose Goslinga, fondatrice de Pula

Tanzanie : Pula offre des micro-assurances aux agriculteurs

Pula offre des micro-assurances aux agriculteurs tanzaniens grâce aux données satellites. Elle a développé un produit d’assurance pour couvrir spécifiquement les risques liés au manque de pluie. La startup a mis en place un système de souscription par sms simple et adapté aux comportements des zones rurales. Elle s’appuie sur des images aériennes pour contrôler et dédommager immédiatement les quelque 600 000 agriculteurs qui ont recours à ses services. C’est en travaillant pour le ministère de l’Agriculture du Rwanda après ses études d’économie, que Rose Goslinga, Fondatrice de Pula est confrontée aux problématiques auxquelles doivent faire face les agriculteurs rwandais. En effet, outre les agriculteurs, une majorité d’Africains possède des cultures vivrières. Toutefois, ces cultures sont dépendantes de la pluviométrie. S’il continue de pleuvoir après que les terres ont été ensemencées alors les récoltes seront bonnes. En revanche, s’il cesse de pleuvoir, les semences ne sont plus utilisables et les récoltes impossibles. 

Employée au ministère de l’Agriculture, Rose Goslinga participe à la création d’une assurance pour les agriculteurs rwandais. Après quelques années d’expérience au sein d’une fondation suisse, elle décide de lancer Pula en 2015 : une offre de micro assurance aux agriculteurs contre les aléas de la pluviométrie. 

Étendre ses services à l’Inde 

En 2017, Pula a fait bénéficier d’une micro-assurance 600 000 agriculteurs répartis dans 8 pays et prévoit d’étendre ses services à l’Inde. Lors de l’achat des semences, les commerçants ayant signé un partenariat avec Pula présentent et proposent l’offre de micro-assurance aux agricultures. De retour dans leur propriété, ils envoient leur code de souscription par sms au numéro indiqué sur la carte d’abonnement. Cela permet à Pula de géolocaliser la propriété par satellite et de contrôler la pluviométrie dans cette zone. Dès lors que la pluie cesse de tomber, Pula s’engage à dédommager les souscripteurs situés dans la zone sans contrôle physique additionnel. Ils reçoivent enfin de nouvelles semences de la part de Pula. Cette dernière constitue une double innovation. D’abord, le mode de souscription via sms et grâce aux partenariats avec les commerçants, elle contribue à maximiser la portée de l’offre. Ensuite, le suivi de la pluviométrie par satellite est un moyen intelligent de lutter contre l’aléa moral tout en réduisant les coûts de contrôle. Les coûts de transactions sont élevés sur les marchés africains notamment du fait d’institutions parfois défaillantes et Pula annihile grâce à la technologie les frictions présentes sur le marché de l’assurance aux agriculteurs.

Adamou Nchange Kouotou, fondateur de Agrix Tech

Adamou Nchange Kouotou, fondateur de Agrix Tech

Cameroun : Agrix Tech pour prévenir et traiter les maladies des cultures

Agrix Tech, une startup camerounaise de technologie agricole, fondée par Adamou Nchange Kouotou, a développé une application mobile qui aide les agriculteurs à prévenir et traiter les maladies des cultures, grâce au machine learning (apprentissage automatique).  

Installée sur le smartphone de l’agriculteur, l’application scanne la plante malade ; ce qui permet d’enregistrer une vidéo qui est automatiquement analysée avec les techniques d’apprentissage automatique. L’agriculteur reçoit ensuite des recommandations pour le traitement de la plante. L’application peut également donner des conseils et rappeler des tâches à l’agriculteur pendant le cycle de production.  Pour le moment, la startup revendique 230 utilisateurs de son outil qui se heurte encore aux doutes de nombreux petits agriculteurs, pas habitués aux nouvelles technologies. De plus, le faible taux de pénétration des smartphones dans les zones rurales du continent constitue un frein pour la solution.  Notons que le modèle économique de l’agritech repose sur la vente d’espaces publicitaires sur son application, mais aussi des licences d’utilisation aux personnes qui veulent l’exploiter à grande échelle comme les sociétés de conseil agricole.  Pour rappel, selon Adamou Nchange Kouotou, 49 % des cultures sont perdues en Afrique à cause des maladies et des ravageurs de cultures.

Mignane Diouf, fondateur d'Afrikamart

Mignane Diouf, fondateur d’Afrikamart

Sénégal : Afrikamart, un pont entre agriculteurs et distributeurs

En Afrique, les agriculteurs sont confrontés à des problèmes d’accès insuffisant au marché, d’informations limitées et de retards de paiement de la part des intermédiaires, tandis que les commerçants (dont 80 % sont des femmes ) s’appuient sur des courtiers et des intermédiaires peu fiables qui gonflent souvent le prix des produits, ce qui les rend chers pour le consommateur final. Comme solution, Mignane Diouf s’est tourné vers les technologies et a créé en 2018 une plateforme de vente en ligne de produits frais.

Afrikamart, startup du domaine de l’AgriTech, propose une plateforme digitale qui met en relation les agriculteurs ruraux du Sénégal et les commerçants des zones urbaines. C’est une plateforme de distribution de produits frais qui offre également des services de marketing et d’accompagnement. Elle regroupe producteurs, détaillants, hôtels, restaurants et supermarchés du pays. Mignane Diouf et son frère travaillant dans l’import-export, ont constaté la forte demande en produits vivriers sur les marchés étrangers.  «Nous avons importé des légumes du Maroc et nous nous sommes demandé pourquoi il était plus facile d’importer de grandes quantités de fruits et légumes du Maroc que de se procurer ces produits au Sénégal», a-t-il confié sur How we made it in Africa. D’après lui, les deux extrémités (agriculteurs-marché) de la chaîne de valeur sont surfragmentées, ce qui rend la synchronisation difficile.

Ce problème est aggravé par le mauvais état des routes et la logistique défaillante, entraînant la perte d’une grande quantité de produits. En mettant la technologie au service de l’agriculture locale, Afrikamart joue le rôle d’intermédiaire entre les deux parties prenantes pour limiter les pertes après récoltes. La startup dispose de plusieurs canaux d’acquisition pour les fournisseurs. Elle recrute les agriculteurs sur le terrain avec ses agents présents dans les zones rurales pour faire sa promotion dans les communautés. Elle s’associe également à des magasins qui fournissent aux agriculteurs des intrants, des outils ou des services liés à l’agriculture. Malgré les difficultés, Afrikamart a réussi à se frayer un chemin dans la Supply Chain au Sénégal. À ce jour, elle livre jusqu’à 8 000 kg de produits frais par jour, travaille avec plus de 600 agriculteurs et a créé plus de 200 emplois indirects.