Etendu sur plus de dix mille hectares, le parc national de la Rusizi est l’un des trois parcs nationaux que compte le Burundi. Avec une faune très variée, une flore très diversifiée et endémique, c’est une des destinations des touristes.  Reportage.

Situé à proximité de Bujumbura, la capitale économique du Burundi, à 10 km du centre-ville vers le poste frontière de Gatumba, le parc national de la Rusizi a une superficie de 10.673 hectares. Un patrimoine subdivisé en deux secteurs. Au sud, il y a le secteur Delta, à l’embouchure de la rivière Rusizi vers le lac Tanganyika. Il s’étend sur 1.363 hectares tandis que la partie nord est occupée par le secteur Palmeraie avec 8.867 hectares.

Les deux secteurs étant reliés par un corridor constitué par la partie appelée ‘’grande Rusizi’’ et un ruban de terrain de 100 mètres de part et d’autre de cette rivière. Cette partie s’étend sur 443 hectares. Selon Pacifique Ininahazwe, Conservateur en chef du parc, le secteur Delta est très riche en biodiversité.   Sur des sables de la Rusizi ou dans l’eau, on peut observer des hippopotames, des crocodiles, etc. Un vrai spectacle. Des scènes splendides.

En tout, ce patrimoine abrite jusqu’à 19 espèces de mammifères dont les hippopotames, les antilopes, le sitatunga, le serval, le chacal à flancs rayés, le grivet ainsi que plusieurs espèces de petits mammifères, 12 espèces de reptiles principalement les crocodiles, les serpents comme les pythons et des varans, énumère-t-il, insérant que de nombreuses autres espèces de rongeurs, d’insectes, … grouillent dans ce parc.

Ici, des milliers d’oiseaux : « Nous avons plus de 350 espèces sédentaires et migratrices », énumère-t-il, notant que les bancs de sable dans la rivière et au-delta servent de repos diurne pour de grands groupes de Dendrocygnes ( dendrocygna viduata et dendrocygna bicolor dont la population peut aller jusqu’à 6 mille têtes en saison sèche.

Les prairies émergées de ce secteur constituent des sites de nidification pour nombreuses espèces limicoles telles Himantopus himantopus, Venellus coronatus, etc.

Le parc national de la Rusizi est aussi un lieu de passage, de repos, d’hibernation pour les oiseaux migrateurs intra-africains et paléarctiques, poursuit sa description. On y trouve des oiseaux aquatiques d’Afrique de l’est sur plus de la moitié de l’année : on citerait les pélicans gris, le cormoran pygmée africain, le bec en ciseaux et plusieurs espèces de tisserins et de hérons.

Traversée par une rivière, Pacifique Ininahazwe fait état de 44 espèces de poissons vivant dans ce parc et onze espèces qu’on trouve dans les lagunes faisant partie intégrante du parc.

Une flore très variée

Faune et flore au Burundi

Des hippopotames en liberté au parc national de la Rusizi du Burundi

Toute la plaine de l’Imbo où se situe le parc national de la Rusizi est composée d’alluvions salines. Ainsi, plusieurs espèces d’arbres, herbes existent dans son secteur palmeraie. On y trouve plus de 1000 espèces végétales formant quatre formations végétales distinctes décrit M.Ininahazwe. La formation à Hyphaene benguellensis var.ventricosa qui occupe au moins 1200 hectares le long de la rivière Rusizi. «On les appelle des faux palmiers et c’est une espèce endémique», explique-t-il, déplorant néanmoins que cette espèce est menacée d’extinction.

Les facteurs d’extinction étant de deux ordres. D’abord, avance-t-il, il y a le facteur humain : «Il y a des gens qui vont dans le parc pour y cultiver et des fois, ils coupent ces arbres. Il y a aussi le principal cimetière du pays, cimetière de Mpanda installé de ce secteur et qui ne cesse d’agrandir».   Selon lui, la présence des éléphants favorisait sa multiplication.  « En se nourrissant des fruits de ces arbres, ces mammifères participaient dans sa multiplication. Ces fruits qui constituaient la principale alimentation des éléphants contiennent des graines qu’ils ne peuvent pas digérer.  Et ces dernières se retrouvaient dans leurs bouses ici et là pour redonner naissance à de nouveaux faux palmiers», fait-il savoir. Or, avec la crise politico-sécuritaire de 1993, aucun éléphant n’a survécu, ils ont été tués lors des affrontements qui ont opposé des rebelles et l’armée régulière de l’époque.  Et d’annoncer qu’un projet de repeuplement d’éléphants et d’autres animaux  est en cours d’analyse.  A côté des faux palmiers, il cite les bosquets kérophiles à Cadaba farinosa var. adenotricha et commiphora madagasacariensis.  D’autres formations végétales sont constituées d’euphorbe candélabre (Euphorbia Candilabrum) ; d’une steppe à Bulbine abyssinica sur les salonetz ; les formations de recolonisation à Acacia hockii ; les formations aquatiques et semi-aquatiques des dépressions de profondeur moyenne envahies par Hygrophila auriculata. Dans les dépressions profondes à nappe d’eau permanente, on y trouve des plantes flottantes, énumère-t-il.

Côté secteur Delta, plus de 193 espèces végétales y sont déjà identifiées. « Il s’agit d’une savane herbeuse et arborée avec une dominance des Phragmites mauritianus, des Acacias polyacantha var. campylacantha et une végétation aquatique des plantes flottantes », détaille-t-il, ajoutant que ce secteur est aussi envahi par un fourré à lantana camara.

Les menaces ne manquent pas

Le braconnage n’a pas encore cessé totalement. Situé dans une région où les gens aiment consommer la viande, Jean Bosco Sinzohagera, éco-garde du parc indique que des braconniers s’introduisent clandestinement dans ce parc. Ils ciblent les petits animaux comme les antilopes, les volailles comme les perdrix, les pigeons, … Des pêcheurs illégaux sont aussi souvent arrêtés, précise-t-il, reconnaissant néanmoins que ce phénomène tend à disparaître grâce à l’implication des riverains dans la protection de ce patrimoine.

Il souligne que le secteur palmeraie est le plus menacé.  Des gens qui défrichent pour des terres cultivables, ceux qui font la carbonisation, le paquage des animaux, etc.  M.Sinzohagera mentionne par exemple que les fruits des faux palmiers sont consommés par les riverains tandis que pour eux, leurs graines ont des vertus médicinales.

Pacifique Ininahazwe, pour sa part, revient sur l’insuffisance du personnel pour la protection de ce parc : « Le grand défi que nous avons c’est vraiment le personnel qui est minime. Par exemple, au niveau du secteur palmeraie, on a que huit écogardes. C’est vraiment, c’est très peu comme personnel pour pouvoir protéger toute cette étendue de 6 mille hectares », renseigne-t-il, notant, en outre, que ces garde-garde-forestiers ne sont pas bien équipés et sont âgés.

L’autre menace est les inondations récurrentes du parc.  Selon M.Ininahazwe, conservateur en Chef, le parc national de la Rusizi est souvent inondé, sur le secteur delta, suite aux crues de la rivière Rusizi : « Et quand il y a inondation, les animaux se dispersent pour trouver refuge, ils manquent de pâturage, et le nombre de visiteurs diminue sensiblement. »

La plaine de la Rusizi dans laquelle se trouve le parc national de la Rusizi est partagée entre la République démocratique du Congo (RDC), le Rwanda et le Burundi. Elle couvre une superficie d’environ 3000km2 dont 1.750 km2 pour le Burundi qui compte deux  autres parcs nationaux à savoir le parc national de la Ruvubu ( Est) et le parc national de la Kibira ( Nord-ouest).