Tout d’abord saluons l’accord entre Qatar Airways et Airbus dans le litige qui les opposait suite à la détérioration de la peinture des A350 livrés u transporteur du Golfe. Sans cet « happy end » il était plus que vraisemblable que la guéguerre entre les deux mastodontes n’aurait enrichi que les cabinets d’avocats et ce pendant des années.
C’est chose faite et Qatar Airways va pouvoir compléter sa flotte d’A 350 des quelques 21 appareils que l’aviation civile qatari avait cloués au sol, sans doute sur la demande du charismatique président de la compagnie, des 23 A350/1000 qu’Airbus doit encore livrer et des 50 A 321 Neo que le constructeur retenait en attendant la solution au conflit. Au total Qatar va se voir doter de 44 gros porteurs et de 50 moyens porteurs qui peuvent également assurer des longs courriers. Autant dire l’équivalent d’une flotte entière pour une compagnie de taille déjà importante.
Cela arrive à point car le trafic aérien déjà bien reparti en 2022 va encore recevoir une poussée supplémentaire avec l’arrivée des marchés asiatiques dont on mesure mal encore l’impatience de leurs consommateurs pour retrouver la voie des airs. En dépit de la pression considérable des écologistes largement soutenus par les médias, on se demande d’ailleurs bien pourquoi, la demande de transport aérien ne fera que croître dans les prochaines années, même avec des tarifs sensiblement plus élevés que par le passé.
Alors comment résoudre la « quadrature du cercle » ? La recherche par les compagnies aériennes de la bonne solution pour diminuer les coûts afin de ne pas trop demander aux économies internes a finalement trouvé sa solution dans le Covid. La période dramatique que le transport aérien a traversée a permis de rebattre les cartes. Très naturellement de nombreux salariés du secteur l’ont quitté pour se diriger vers des métiers jugés plus intéressants et sans doute moins contraignants. Cela a permis d’alléger le volume de personnel et de repenser un management plus efficace. De plus la nécessité d’amener progressivement le transport aérien à l’abri des menaces permanentes portées par la vague écologique, a permis d’inverser la courbe tarifaire jusqu’alors tirée vers le bas dans une folle course au volume.
Deux facteurs fondamentaux ont ainsi changé la donne économique : moins de charges d’un côté et une meilleure recette unitaire de l’autre, le tout avec un nombre de passagers certes encore en baisse par rapport à 2019, mais suffisamment important pour garantir une sérieuse rentabilité, comme d’ailleurs cela se constate chez les méga transporteurs américains. Des lors, il ne faut pas être grand clerc pour prédire qu’une fois retrouvé les niveaux de 2019, le trafic va repartir à la hausse. Reste à savoir comment cette croissance pourra être compatible avec l’objectif de réduction des émissions de CO².
Il est vraisemblable de voir se multiplier les vols longs courriers avec les nouveaux appareils biréacteurs monocouloirs de 200 à 250 places. Les deux grands constructeurs ont en effet fait le choix d’appareils plus petits et pourtant très performants en abandonnant les très gros porteurs qui ont fait la prospérité des grandes compagnies, je veux parler du Boeing 747 et de l’Airbus 380 dont l’arrêt de la production a été annoncé avec une curieuse simultanéité, mais ce n’est sans doute qu’un hasard.
Seulement pour absorber le surcroît de demande qui ne va pas manquer de se déployer, il va sans doute manquer un avion de grande capacité, capable de faire un saut équivalent à celui que l’on a connu lorsque les appareils long-courriers sont passés de 100 à 400 sièges. La croissance, même si elle n’atteint pas les taux de 5% que l’on a connu par le passé, va s’appliquer sur des volumes déjà considérables. Sur la base de 4 milliards de passagers que l’on connaissant en 2019, l’application d’une croissance 2 fois inférieure, soit 2,5%, amène tout de même à 750 millions de passagers supplémentaires dès l’année 2030. Comment fera-t-on pour donner satisfaction aux populations qui souhaitent se déplacer sans disposer des capacités suffisantes ?
En l’absence de vraie révolution dans les modes de propulsion que l’ont ne peut raisonnablement pas envisager avant le milieu des années 2040, il paraît logique que Boeing aussi bien qu’Airbus réalisent une version modernisée et écologique des deux géants qu’ils viennent de mettre au rebut. C’est ce que demande Tim Clark, le remarquable CEO d’Emirates et il ne s’est jamais trompé.