Adulé par certains, respecté par tous, Roger Federer a tiré un trait, samedi, sur près de 25 années d’une carrière exceptionnelle dans le tennis en s’inclinant à la Laver Cup, à Londres, lors d’un bal d’adieu en double avec son plus grand rival, Rafael Nadal. Ils ont été battus par la paire américaine composé de Jack Sock et Frances Tiafoe.

Le débat sur le meilleur joueur de l’histoire est sans fin, mais par son palmarès, son jeu brillant, son élégance et son charisme, Roger Federer restera dans l’histoire comme le maître incontesté du tennis mondial.

Il a tiré sa révérence, samedi 24 septembre, devant une salle comble, en jouant son dernier match en double associé à Rafael Nadal. La paire a perdu face aux Américains Jack Sock et Frances Tiafoe lors de la Laver Cup, à Londres.

Roger Federer, Rafael Nadal,

Federer, le meilleur tennisman de tous les temps a terminé sa carrière sur une défaite au Laver Cup en duo avec Nadal

Depuis qu’il a annoncé sa retraite, « Pistol » Pete (Sampras), le Kid de Las Vegas (Andre Agassi), le Taureau de Manacor (Rafael Nadal), tous se sont inclinés devant le maître. 

« Salut Roger, c’est Pistol (…) Lorsqu’on s’est affronté pour la première fois, tu n’avais que 19 ans (…) Nous avons livré une grosse bataille sur le Centre court de Wimbledon et tu m’avais battu en cinq sets », a rappelé Sampras, dont les apparitions publiques sont extrêmement rares depuis qu’il a quitté le circuit en 2002, mais qui s’est fendu d’une vidéo sur les réseaux sociaux pour saluer le départ à la retraite du Suisse.

« Ton jeu et ton esprit nous ont enseigné à quel point le jeu de tennis pouvait être beau (…) Merci RF », a complimenté Agassi.

« C’est l’un des joueurs, si ce n’est le joueur, le plus important dans ma carrière », a affirmé Nadal, détenteur du record de titres du Grand Chelem (22), avant de jouer en double à ses côtés le dernier match du Suisse dont le compteur restera bloqué à 20 Majeurs, dépassé également par Novak Djokovic (21).

Mais dans les cœurs, il restera presque partout le numéro un. À Wimbledon, son terrain de jeu préféré où il s’est imposé huit fois, à Roland-Garros où le public a été soulagé de le voir compléter sa collection de Grands Chelems en 2009, et dans tous les tournois où ses fans le soutenaient inconditionnellement.

C’est que Federer avait tous les attributs du champion idéal. Et avant tout un jeu à nul autre pareil, esthétique, offensif, enthousiasmant.

« Il y a des gens qui ont suivi le tennis sans aimer le tennis, pour regarder Federer », a relevé l’ancien numéro 1 suisse Marc Rosset.

« Parfait », selon Nadal

« Il a un service parfait, une volée parfaite, un coup droit plus que parfait, un revers parfait (à une main) ; il est très rapide, tout est parfait chez lui », a résumé Nadal.

Roger Federer

Federer et son rival de toujours, Nadal

En dehors des courts, le Suisse est aussi une sorte de gendre idéal : amoureux depuis plus de vingt ans de la même femme, Mirka Vavrinec, une ancienne joueuse de tennis d’origine slovaque qu’il a rencontrée aux Jeux de Sydney en 2000, père attentionné de quatre enfants (des jumelles et des jumeaux), engagé dans l’action caritative, notamment en Afrique du Sud, le pays d’origine de sa mère, l’ami de Tiger Woods fait presque l’unanimité.

Même chez ceux qu’il a martyrisés sur le court. « J’aimerais te détester, mais tu es trop sympa », lui a dit Roddick après une finale de Wimbledon.

Le Suisse a toujours aimé « donner l’image de quelqu’un de bien », y compris en soignant sa communication lors d’interminables séances d’interviews accordées sans rechigner dans les quatre langues qu’il maîtrise (suisse allemand, anglais, français, allemand).

Son palmarès est gigantesque. Aux titres du Grand Chelem il faut ajouter six Masters, une Coupe Davis et une médaille d’or olympique (en double avec Stan Wawrinka), l’or du simple restant le seul trophée important qui lui fasse défaut. Au total, il a raflé 103 titres sur le circuit ATP et passé 310 semaines à la première place mondiale, un record que Djokovic a depuis spectaculairement porté à 373.

Certes, le talent a été précocement détecté chez ce garçon né à Bâle en 1981. Mais ce « diamant brut à polir », selon sa propre expression, a dû réprimer un côté dilettante et une tendance à balancer sa raquette quand les choses ne tournaient pas comme il le voulait.

Maturité tardive

Pour cette raison, il a dû attendre sa sixième année sur le circuit pour soulever son premier trophée majeur, sur le gazon de Wimbledon en 2003, à presque 23 ans.

Cet accomplissement dans le tournoi qu’il chérit entre tous a sonné le début d’un festin de titres du Grand Chelem : onze – sur 16 possibles – de 2004 à 2007. La concurrence d’alors, Lleyton Hewitt et Andy Roddick au premier rang, est écrabouillée.

Les choses se corseront lorsqu’arriveront à maturité Nadal et Djokovic, mais Federer continuera à gagner et la légende s’enrichira de matches épiques, comme les deux finales de Wimbledon de 2007 (gagnée) et 2008 (perdue) contre l’Espagnol. Sur le déclin (provisoirement) à partir de 2011, il a signé un époustouflant retour au premier plan en 2017 et 2018 et ajouté à sa collection trois titres du Grand Chelem pour finir avec huit Wimbledon, six Open d’Australie, cinq US Open et un Roland-Garros.

D’un physique apparemment ordinaire (1,85 m) mais doté de qualités de vitesse et d’endurance exceptionnelles, il a eu l’avantage de n’être presque jamais blessé jusqu’à plus de 35 ans. Il a subi sa première opération, à un genou, en 2016, après s’être fait mal… en donnant le bain à ses filles.

Habité d’une intarissable soif de victoires, il a approché des records de longévité – son dernier titre à l’Open d’Australie en avait fait le deuxième vainqueur le plus vieux d’un tournoi du Grand Chelem derrière Ken Rosewall – lorsque son genou récalcitrant a mis un terme à sa fabuleuse épopée, à 41 ans, après plus de 1 500 matches sur plus de 24 ans.

Avec AFP