L’annonce faite le 16 juin dernier par le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, dénonçant l’échec de la Mission des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) avant d’exiger son «retrait sans délai» avait pris tout le monde de court.
Dans ces conditions et alors que le Conseil de sécurité se préparait à examiner une reconduction du mandat, possiblement modifié, c’est finalement la fin pure et simple de la mission la plus coûteuse de l’ONU (1,2 milliard de dollars par an) qui est sur la table, plongeant dans l’inconnu un pays en proie à des incursions terroristes. Le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, avait pourtant début juin jugé le maintien de la présence de la MINUSMA «inestimable», mettant en avant les craintes de pays de la région d’une «expansion des groupes extrémistes» en cas de retrait.
Depuis lors, la fin du mandat des Casques bleus au Mali dans quelques jours ne semble plus faire de doute et les négociations à l’ONU butent encore sur le calendrier de leur départ. Malgré tout, ils étaient 182 agents de la MINUSMA à sécuriser les opérations de vote du référendum constitutionnel le 18 juin dernier organisées par l’Autorité Indépendante de Gestion des Elections au Mali (AIGE). Face à l’effet de surprise, l’ONU a demandé jusqu’à ce jour 30 juin pour négocier les délais et les modalités de ce retrait forcé. Car, faire partir 15 000 hommes dont 13 000 soldats et policiers galonnés avec le matériel est un défi logistique immense ! C’est en ce sens que la France a initié un projet de résolution qui prévoit six mois pour le retrait de la force onusienne, là où d’autres partenaires misent sur un délai plus long d’un an, voire plus. La question qui se pose est de savoir à quoi répondent tous ces tiraillements.
Il est difficile d’envisager un éventuel prolongement pour cette mission qui cesserait ses activités dès le 1er juillet
Tout porte à croire que derrière l’impréparation de la MINUSMA à un retrait imminent du Mali, se cache une volonté de garder le plus longtemps possible le pied si ce n’est un œil sur l’évolution de la situation sécuritaire dans ce pays où la question des droits de l’homme est sujette à caution, dans la lutte contre l’extrémisme violent. C’est dire si au-delà de toutes considérations, il y a des raisons de croire que la rupture qui conduit aujourd’hui au divorce précipité entre les autorités intérimaires du Mali et l’ONU est le résultat d’une crise de confiance qui a vu les rapports entre les deux parties se détériorer au fil des ans au point que la collaboration était devenue très difficile. En effet, c’est avec peine que la MINUSMA cachait son exaspération face à ce qui passait à ses yeux pour des entraves à son action. Mais, non contente de ne pas répondre entièrement aux attentes des autorités maliennes en raison d’un mandat non offensif qui ne lui permet pas de monter à l’assaut des groupes terroristes, la mission onusienne était devenue source d’ennuis pour Bamako, pour ses accablants rapports d’atteintes aux droits de l’Homme produits contre l’armée malienne et ses supplétifs russes de Wagner. Mais avec ce retrait exigé de la MINUSMA quelques mois après celui non moins forcé de la Force française Barkhane et de sa consœur européenne Takuba, le Mali a l’occasion de s’assumer pleinement. Et maintenant que le retrait de la MINUSMA dont le mandat arrive à expiration ce 30 juin 2023, semble acté, quel deadline sera annoté vu que la Douane malienne a déjà émis un document daté du 27 juin 2023, enjoignant d’arrêter toute «importation du matériel destiné à la dotation de la MINUSMA.»
Si l’on part du principe que le maintien de la paix repose sur le «consentement» du pays hôte, il est difficile d’envisager un éventuel prolongement pour cette mission qui cesserait ses activités dès le 1er juillet pour se concentrer sur son retrait, avec l’objectif de terminer ce processus d’ici le 31 décembre 2023. En tout état de cause, il revient aux autorités de la Transition de travailler à ce que les Maliens ne regrettent pas le départ de ces forces internationales.