Le portefeuille actuel de la Banque mondiale, dans la région d’Afrique de l’Ouest et du Centre, est de quelque 39 milliards de dollars. Rien que l’année dernière, la Banque y a approuvé des prêts d’un montant de 11,5 milliards de dollars. Mais sa contribution s’évalue de plus en plus en termes de conseil et d’accompagnement pour transformer ces ressources en développement structurel dans 22 pays concernés.

Ousmane Diagana, Vice-président de la Banque pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre nous explique comment …

 

«Notre mission, réduire les inégalités abyssales»

AFRIMAG : Comment estimer le soutien de la Banque aux 22 pays de la région, au regard des défis auxquels ils font face ?

Ousmane Diagana : Les missions de la Banque mondiale consistant à aider les pays à éradiquer la pauvreté, créer les conditions d’une prospérité partagée, soutenir un développement durable et équitable sont au cœur de nos priorités en Afrique de l’Ouest et du Centre. L’objectif que nous nous assignons dans ces missions protéiformes est de réduire autant que faire se peut les inégalités abyssales. 

Les programmes financés par la Banque mondiale ambitionnent d’accompagner les pays à trouver des solutions à leurs problèmes de développement. A cet égard nous soutenons les différents secteurs de développement économique et social : agriculture, énergie, environnement, développement humain, eau, etc. Les financements disponibles sont certes importants mais notre objectif est d’en augmenter le volume pour des impacts tangibles, durables et de qualité en faveur des populations.

 

AFRIMAG : Ces pays ne sont pas logés à la même enseigne. Ceux du Sahel en Afrique de l’Ouest et la RD Congo ont des défis encore plus prégnants…

Dans la clef de répartition des fonds, sont-ils tous servis de la même manière ou est-ce en fonction des besoins ? 

Ousmane Diagana, Vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale

Ousmane Diagana : Vous voudriez bien noter que dans la répartition géographique, la RD Congo ne fait pas partie de mon portefeuille. Ceci dit, je voudrais préciser deux choses :

Premièrement, en intervenant dans un pays, nous faisons une combinaison de nos instruments existants : opérations d’investissement, programmes de réformes, assistance technique, analyses et conseils. En ce qui concerne les réformes, nous insistons sur la gouvernance, la redevabilité, la transparence dans l’utilisation des ressources. Nous nous appuyons sur notre expertise internationale pour mettre à la disposition de nos clients les expériences réussies, ailleurs tout en tenant compte des réalités locales.

Deuxièmement, il y a effectivement une clé de répartition des ressources au niveau de la Banque qui se fonde sur des paramètres divers et variés parmi lesquels la taille de la population, la performance dans la gestion des ressources. En plus de ces deux paramètres, nous prenons en compte les facteurs liés à la vulnérabilité et à la fragilité des pays. C’est une pondération d’un ensemble de facteurs qui est considérée dans le mécanisme d’allocation des ressources.

AFRIMAG : Auriez-vous une préférence pour des projets mutualisés ?

Ousmane Diagana : Nous agissons sur deux types de projets : régionaux et nationaux. Les projets régionaux sont cruciaux pour la réalisation d’économies d’échelle plus importantes et pour réduire les coûts de transaction. Compte tenu de la géographie et de la démographie des pays, les projets régionaux sont particulièrement pertinents en particulier dans le secteur des infrastructures (énergie, transport). 

AFRIMAG : La Banque mondiale est l’une des principales institutions financières avec lesquelles les pays d’Afrique de l’Ouest et Centrale coopèrent pour des financements de projets, des appuis budgétaires ou de rééchelonnement de dettes et d’aide au développement. Quelle évaluation objective faire aujourd’hui de cette coopération ?

Ousmane Diagana : Le développement est un processus à long terme. Il est important de rappeler que l’instrument «Association internationale de développement» (IDA) a été créé en 1960, décennie de l’indépendance de la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre. 

Depuis l’admission de ces pays à la Banque mondiale, il y a eu des programmes d’investissements importants avec des résultats cumulés variables d’un pays à un autre. S’il y a eu souvent des hauts et des bas, ils sont parfois liés à des contingences politiques, sociales et économiques. Mais la Banque mondiale a pour principe de rester toujours engagée pour apporter des solutions aux problèmes des populations. Car, en dernier lieu, ce sont elles les priorités d’une organisation de développement comme la nôtre.  

Je dois néanmoins relever que durant les deux dernières décennies, dans l’ensemble, l’Afrique a enregistré des progrès indéniables. La pauvreté a été divisée par deux dans la plupart des pays. La croissance a connu une augmentation significative avec une moyenne de 5%. Dans certains secteurs tels que l’éducation, le progrès réalisé dans le cycle primaire est fulgurant avec un niveau proche de l’accès universel. Toutefois, nous ne devrions pas perdre de vue que ce succès est relatif, car il est plus quantitatif que qualitatif. Ce qui signifie qu’un long chemin reste à parcourir. 

AFRIMAG : Outre l’éducation que vous citez, la qualité de la santé aussi laisse à désirer. Que faites-vous en termes de benchmark, de conseil, d’allocation des ressources pour aider ces pays à se relever ? Les partages des succès sont-ils pris en compte pour orienter ces pays vers des nouveaux modèles ?

Ousmane Diagana : En effet comme je viens de le souligner les progrès enregistrés dans le secteur de l’éducation sont réels. Mais des défis importants demeurent en ce qui concerne la qualité, la pertinence et la gouvernance.

Lorsque j’ai pris fonction, nous avons travaillé en étroite consultation avec les pays à l’élaboration d’une stratégie pour l’éducation en Afrique de l’Ouest et du Centre. Nous avons établi un diagnostic approfondi et objectif avec des recommandations que nous avons discutées et validées avec nos partenaires que sont les différents gouvernements. Le diagnostic nous a permis de relever un certain nombre de carences qui font que la qualité n’est pas toujours au rendez-vous. Idem dans le système de santé de ces pays où nous menons actuellement un travail similaire. De ces diagnostics, nous tirons un certain nombre de conclusions édifiantes. Ainsi, nous avons noté que les allocations budgétaires pour ces secteurs en Afrique sont basses et très en deçà des standards internationaux. Plus concrètement, lorsque le ratio du PIB consacré au financement de l’éducation de qualité ailleurs dans le monde se situe entre 4% et 6%, en Afrique il ne dépasse guère 2%. De même, quand les pays de l’OCDE et d’autres y consacrent en moyenne 20% de leur budget les pays de notre Région affectent moins de 15% de leurs ressources à ce secteur vital. Mais au-delà de l’aspect quantitatif du budget alloué à l’éducation, c’est la qualité de la dépense qui préoccupe.

L’autre handicap du système éducatif et que le diagnostic a relevé est le nombre élevé d’enfants qui n’achèvent pas leur scolarité au cycle primaire pour différentes raisons. Pire, nombreux sont ceux qui atteignent la fin du cycle primaire pour en sortir sans le minimum de connaissances requises. D’après nos évaluations, en Afrique 80% des enfants de 10 ans n’achèvent pas le cycle primaire à cause de lacunes sérieuses dans l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et des bases de mathématiques. Nous travaillons sur des projets spécifiques pour aider les pays à surmonter ces carences.  

AFRIMAG : Certains affirment que la Banque mondiale, comme le FMI du reste, impose souvent aux Etats africains des programmes d’ajustements structurels impactant lourdement des secteurs sociaux comme la santé et l’éducation. D’autres attribuent ces coupes budgétaires aux problèmes de gouvernance. Comment est reçu et analysé ce débat au sein de votre institution ?

Ousmane Diagana : C’est surtout un cliché ! Et les clichés ont la vie dure.  Les programmes d’ajustement structurel (PAS) ont été conçus dans des périodes de crise économique et financière que les pays africains ont traversé à partir du début de la décennie 80. Des politiques économiques couteuses, insoutenables étaient en vigueur. Il en a résulté des déséquilibres sociaux, politiques et financiers. Pour y remédier, des pays africains avaient fait appel aux institutions de Bretton Woods conduisant à la définition d’un nouveau type de coopération avec ses avantages et inconvénients.

Le PAS n’est plus utilisé ni dans notre jargon ni dans nos modalités de partenariat. Aujourd’hui existent de nouveaux instruments nous permettant de dialoguer avec les gouvernements sur la base des programmes qu’ils ont choisis et préparés eux-mêmes. A notre niveau, nous intervenons de manière indépendante pour proposer ce qui, selon notre expérience et expertise, peut marcher sur la base des analyses économiques, les comparaisons internationales et les besoins spécifiques des pays.

En dernier lieu, ce sont les Etats qui ont la destinée de leur population. La Banque mondiale n’est que leur instrument. Ne perdons jamais de vue que la Banque mondiale appartient aux pays dont le conseil d’administration est composé uniquement de leurs représentants. Toutes les politiques que nous mettons en place, toutes les procédures que nous utilisons dans le cadre de l’exécution de ces politiques, de leur suivi et de leur évaluation sont fondées sur des directives du conseil d’administration composé par ces gouvernements. 

Visite guidée du Vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre dans une exploitation agricole

Visite guidée du Vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre dans une exploitation agricole

 

AFRIMAG : Les budgets des États et les fonds récoltés auprès d’institutions multilatérales telles que la Banque Mondiale, quelle que soit leur importance, restent limités face à l’ampleur des besoins. 

La rationalisation des choix budgétaires reste l’un des meilleurs moyens pour allouer de façon efficiente ces ressources disponibles rares. Quel plus apportez-vous à ce niveau en termes de conseils ?

Ousmane Diagana : Le développement est un processus de longue haleine. Il n’est pas un long fleuve tranquille. Il nécessite une planification solide fondée sur une analyse pertinente, une participation citoyenne et une appropriation des pays et de leurs gouvernants. Les ressources de son financement doivent être diversifiées, avec une combinaison des ressources domestiques -publiques et privées- ainsi qu’une une contribution des partenaires dont la Banque mondiale.

La rationalisation des choix budgétaires se fait sur la base d’analyse de priorités afin de procéder à des arbitrages cohérents fondés sur une des études techniques et des consultations en interne dans les pays.

AFRIMAG : Quels sont aujourd’hui les grands chantiers de la Banque mondiale en Afrique de l’Ouest et Centrale ? Quid du suivi et de l’évaluation de ces projets sur le terrain ? Comment intervenez-vous à ce niveau ? 

Ousmane Diagana : En termes de grands chantiers, nous nous alignons sur les objectifs nationaux et régionaux tels que définis par les pays eux-mêmes ou à travers leurs organisations régionales. Ceci dit, selon une démarche participative au niveau de notre juridiction nous avons identifié quatre domaines prioritaires d’intervention.

D’abord, le développement humain : il est central et déterminant dans tout processus de développement. Nous plaçons l’éducation au cœur du capital humain. Les questions de santé et de protection sociale sont prises avec le même intérêt. Des investissements significatifs sont en cours pour faire avancer ces dossiers précités. 

Ensuite, la production agricole et la lutte contre l’insécurité alimentaire : les populations doivent avoir accès à une alimentation en abondance et de qualité. L’Afrique, par son immense potentiel, doit être un exportateur net de produits agricoles. 

Puis, l’économie numérique : elle est un facteur d’accélération de progrès, de création d’emplois, de réduction des coûts.

Enfin, l’énergie. Rien ne peut se faire sans elle car elle est au cœur de toutes les stratégies pour réussir le développement tout court. 

AFRIMAG : Votre institution encourage l’intégration régionale en Afrique de l’Ouest et Centrale. Quelles sont les avancées et les difficultés que vous rencontrez sur ce sujet déterminant dans le décollage économique de ces deux zones économiques ?

Ousmane Diagana : J’avais auparavant mentionné la taille des économies, le faible poids démographique des pays en Afrique de l’Ouest et du Centre, excepté le Nigeria. Avec un tel tableau, il est difficile d’apporter des solutions nationales à des problématiques de développement. Donc l’intégration régionale semble être une solution à bien des contextes. Les pays africains l’ont compris très tôt. En 1963 déjà l’Organisation de l’unité africaine (OUA), l’ancêtre de l’Union africaine (UA), et la Banque africaine de développement (BAD), ont été créées. Ce sont des instruments d’intégration par excellence. Au niveau sous régional, la CEDEAO et la CEMAC ont été créées. Le dernier exemple d’importance pour aller dans le même sens, c’est la Zone de Libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Aujourd’hui la Banque mondiale dispose d’un portefeuille de 14 milliards de dollars pour accompagner des programmes régionaux de développement. Je dois néanmoins relever que le niveau des institutions sous-régionales varie en termes de capacités, d’expériences et de ressources

AFRIMAG : Pourtant ces organisations que vous citez comme exemples d’intégration n’ont pas toujours tiré leur région vers le haut. Le take-off reste toujours un rêve. Qu’est-ce qui coince ? 

Ousmane Diagana : C’est l’histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein. Pour rester optimiste, j’ai choisi la seconde option. Une organisation comme la CEDEAO a des textes solides. Les institutions régionales sont des émanations des volontés politiques nationales. Et les politiques sont souvent changeantes d’un pays à l’autre. Je crois que la CEDEAO dans certains domaines n’y échappe pas. 

Comme je l’ai dit plus haut, je préfère regarder le verre à moitié plein. La CEDEAO a réalisé des progrès indéniables dans bien des domaines. Dans celui de l’énergie, le West African Power Pool (le WAPP ou Système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain) a permis à certains pays qui ont un potentiel de production importante de pouvoir subvenir aux besoins de ceux qui sont en déficit structurel.

Cela dit, les écueils restent nombreux. C’est le cas du paradoxe entre les textes sur la libre circulation des personnes et des biens et les centaines de contrôles injustifiés pour aller d’un point A à un point B dans le même espace régional entre différents corridors. On ne favorise pas ainsi les conditions d’une bonne intégration régionale. 

AFRIMAG : Le problème d’accès à l’électricité se pose avec acuité dans cette région. C’est ainsi que depuis près de 20 ans, la Banque mondiale encourage la mise en place d’un marché régional performant de l’électricité sans réel succès. Qu’est-ce qui coince ?

Ousmane Diagana : Des réformes ! Je crois que le rôle des Etats est de définir de bonnes politiques, mettre en place un cadre règlementaire qui soit propice pour permettre au secteur privé de jouer un rôle plus important dans les investissements. Souvent les réformes tardent à se mettre en place. Évidemment cela limite les possibilités d’attirer les investissements qui sont indispensables pour créer un marché de taille critique beaucoup plus vaste. Mais surtout faire en sorte que l’énergie soit à la fois accessible et abordable.

Notre portefeuille dédié à l’énergie en Afrique de l’Ouest et du Centre est de plus de 7 milliards de dollars. L’Afrique dispose des ressources extraordinaires dans le domaine du renouvelable : le solaire et l’éolien notamment. Notre action est d’aider les pays à avoir un mixte énergétique. C’est une priorité pour nous. 

AFRIMAG : Apparemment l’argent est disponible. Le problème se situe au niveau du savoir-faire. Pourquoi ne pas aller vers la gestion déléguée ? Une ville comme Casablanca performe dans la gestion déléguée de l’eau et de l’électricité grâce à la Lydec. Pourquoi ne pas s’en inspirer ? 

Ousmane Diagana : Vous avez parfaitement raison. C’est pour cela que j’ai commencé par des réformes. Les réformes du cadre réglementaire sont essentielles pour abonder dans le sens de l’exemple que vous donnez. 

Dans les programmes d’appui budgétaire, nous ciblons des modalités de gestion similaires dans l’électricité, proches de la gestion déléguée afin que les entreprises publiques dans le secteur de l’électricité recentrent leur rôle sur ce qui est essentiel, et que les compétences pour permettre de répondre à cet agenda puissent être transférées à des nouvelles structures beaucoup mieux outillées. La question de la gouvernance de ces entreprises publiques doit être améliorée. Sans bonne gouvernance, point de bons résultats, et ce quelque soit la méthode de gestion pratique !

AFRIMAG : La pandémie a-t-elle changé la manière dont la Banque mondiale intervient en Afrique ?

Ousmane Diagana : Nous avons vu des opportunités et beaucoup de défis. En termes d’opportunités, nous avons pu mesurer le pouvoir réel du digital sur la vie des personnes et des entreprises. Cela a permis aux secteurs d’activités de pouvoir continuer à fonctionner. Face à ces innovations, nous avons également constaté la faiblesse du système sanitaire dans tous nos pays en termes d’infrastructures, d’équipements et de personnel. Cette question cruciale, nous l’approchons de manière systématique pour apporter des réponses urgentes. Parmi les réponses, figure en tête le financement de ce grand programme de production de vaccins en Afrique. La pandémie a montré que par rapport à l’ensemble de ses besoins vaccinaux, l’Afrique n’en couvre que 5%. Cela n’est pas acceptable. Pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, nous préparons une stratégie pour le renforcement des systèmes sanitaires pour encadrer et accompagner nos opérations futures. 

 

AFRIMAG : Quelle analyse faites-vous de la situation économique en Afrique de l’Ouest et Centrale où plusieurs pays sont en proie aux attaques djihadistes et à l’instabilité politique ?

Ousmane Diagana : C’est un défi majeur ! Plusieurs causes l’expliquent parmi lesquelles la faillite, des systèmes éducatifs, la mauvaise gouvernance, le manque de confiance du citoyen dans les institutions telles que la justice. Dans un tel environnement, quelles que soient les potentialités qui peuvent exister, on ne peut arriver qu’à des tensions jusqu’à des ruptures, comme les coups d’Etat que l’on observe. Il faut œuvrer pour un nouveau contrat social en donnant la possibilité aux citoyens de contribuer à la définition des politiques publiques, à leur exécution, suivi et évaluation. La Banque mondiale a cette possibilité – en tant que partenaire- d’accompagner les pays à mettre en place les plateformes, les outils de diagnostics et les programmes permettant d’atténuer ou de résoudre ces problèmes de fragilité.

AFRIMAG : Les pays d’Afrique de l’Ouest et Centrale font face à la hausse des prix des denrées alimentaires du fait de la guerre en Ukraine. Que fait la Banque mondiale en termes de soutien ?

Ousmane Diagana : Nous avons très rapidement réagi en Afrique de l’Ouest, d’abord en utilisant les projets qui existent pour dégager des ressources dans l’acquisition des denrées alimentaires pour secourir les populations les plus vulnérables.

En tant qu’institution, nous avons mobilisé 30 milliards de dollars pour financer des programmes nouveaux ou complémentaires à ceux qui existent déjà.

Avant la crise ukrainienne, nous avions mis en place un programme alimentaire pour lequel nous avons mobilisé 560 millions de dollars en deux phases. La première est approuvée et mise en œuvre depuis 6 mois. Elle bénéficie au Burkina Faso, au Niger, au Mali et au Togo. La seconde phase a été approuvée seulement le 28 juillet 2022 par notre conseil d’administration. Elle bénéficie au Ghana, au Tchad et à la Sierra Leone.

J’ai beaucoup parlé du secteur de l’agriculture tout au long de cet entretien. C’est une priorité absolue. L’Afrique ne peut pas être un continent de la faim, de la malnutrition et de la sous-alimentation. L’Afrique doit être une solution aux problématiques alimentaires mondiales. Elle en a le potentiel et même le savoir et le savoir-faire.

AFRIMAG : Le Sénégal et la Banque mondiale ont organisé, le 7 juillet dernier, une réunion de haut niveau avec des dirigeants africains afin de mobiliser les pays d’Afrique pour la mise en œuvre du programme de l’Association internationale de développement (IDA-20). On dit déjà que ce nouveau cycle de financement de l’IDA a obtenu 93 milliards de dollars d’engagements des pays donateurs pour la période 2022-2025. Quid de l’enveloppe financière d’IDA-20 et pour quelles priorités ?

Ousmane Diagana : C’est une initiative sans précédent. L’IDA est un guichet au niveau de la Banque mondiale qui a été créé depuis 1960. Au début il y avait peu de pays africains qui bénéficiaient de ses financements. Aujourd’hui 2/3 de ses ressources vont à l’Afrique. 

Sur les 93 milliards de dollars qui ont été mobilisés pour ce dernier cycle appelé IDA-20, ce sont quelque 62 milliards de dollars dont les pays africains vont bénéficier. Parmi ces pays africains, 20 sur 22 sont sous ma juridiction (Afrique de l’Ouest et du Centre). 

C’est pour cela qu’il était important que les pays africains s’impliquent dans le processus de mobilisation et d’utilisation des ressources. Je voudrai donc rendre un hommage d’abord au Président Alassane Ouattara qui a accueilli à Abidjan une réunion des Chefs d’Etats pour lancer la campagne de reconstitution des fonds en juillet 2021, ensuite au Président Macky Sall qui a organisé la réunion autour des priorités d’usage des ressources en juillet 2022. Il en a résulté un appel à l’action autour des points suivants : éducation, santé, eau, agriculture, énergie, économie numérique… La question de la dette qui demeure une préoccupation principale a aussi été discutée.

Un dernier point éminemment central pour les pays africains est comment assouplir et alléger toutes les procédures pour que les ressources qui existent puissent être mobilisées à temps avec des objectifs d’efficacité, d’efficience et de transparence. Nous y attelons!.