Si ce n’est pas une situation d’état d’urgence, ça y ressemble ! Ce n’est plus la police. C’est l’armée qui quadrille entièrement Dakar depuis ce vendredi à l’aube.
Certaines libertés fondamentales sont devenues restreintes au pays de la Téranga, comme la liberté de circulation ou la liberté de la presse. Les réseaux sociaux sont mis au silence.
Les autorités sénégalaises ont déployé vendredi des hommes en tenue et armes de combat dans Dakar où, après le déchaînement de violence de jeudi, beaucoup redoutent un embrasement si le pouvoir fait arrêter l’opposant Ousmane Sonko, candidat à la présidentielle condamné à deux ans de prison ferme.
Des hommes portant treillis et fusils d’assaut ont été positionnés en différents points de Dakar, capitale habituellement grouillante aux rues à présent largement désertées et à l’activité quasiment paralysée après l’une des journées de contestation politique les plus meurtrières depuis des années, ont constaté les journalistes de l’AFP.
L’AFP n’a pu identifier s’il s’agissait de soldats ou de gendarmes en uniformes de camouflage. Ni le porte-parole du gouvernement ni celui de l’état-major n’ont confirmé que les autorités auraient fait appel à l’armée.
Black-out sur les réseaux sociaux
Le ministre de l’Intérieur Antoine Diome a assuré dans la nuit que « l’Etat du Sénégal (avait) pris toutes les mesures » pour rétablir l’ordre.
Le gouvernement a reconnu avoir restreint les accès aux réseaux sociaux comme Facebook, WhatsApp ou Twitter pour faire cesser selon lui « la diffusion de messages haineux et subversifs ».
Dans la crainte des saccages, les magasins sont restés fermés le long de rues entières portant encore les traces des violences de la veille.
A l’université Cheikh Anta Diop, théâtre d’affrontements prolongés et d’importantes destructions, les étudiants ont reçu la consigne de partir et nombre d’entre eux ont quitté le campus en tirant une valise pour attraper un bus ou tout autre moyen de transport.
« Le Sénégal n’a jamais connu pareille situation », a assuré Babacar Ndiaye, étudiant de 26 ans, « nous ne nous attendions pas à ça. Les affaires politiques ne devraient pas nous concerner ».
« Mais il y a injustice », a-t-il dit en parlant de la condamnation d’Ousmane Sonko, le plus farouche adversaire du président Macky Sall, engagé depuis deux ans dans un bras de fer acharné avec le pouvoir pour sa survie judiciaire et politique.
Avant les événements de jeudi, une vingtaine de civils avaient été tués depuis 2021 dans des troubles largement liés à la situation de M. Sonko. Le pouvoir et le camp de M. Sonko s’en rejettent mutuellement la faute.
Dakar, sa banlieue et plusieurs villes ont connu jeudi des affrontements entre jeunes et forces de sécurité et des saccages de magasins et d’équipements publics. Le ministre de l’Intérieur a fait état de neuf morts.
Des heurts épars ont été rapportés vendredi matin. De nouveaux appels à manifester ont circulé pour l’après-midi.
Avec AFP